Delhi Blues…

Après 2 mois de trajet, ça y’est, Kevin l’a attrapé ! Le blues… Une situation difficile 😉 Terriblement dur d’être en voyages pendant 1 an (si vous saviez :-p ). Pire, une partie du quotidien nous manque – on ne veut pas prononcer le mot ‘travail’, mais on y pense. A se demander si on n’est pas fou en se disant parfois : vous qui travaillez, si vous saviez la chance que vous avez ! Ok, on arrête, là !!!  😉
Toujours est-il qu’on ressent le fait d’être étranger. Outre nos habitudes qui diffèrent, on a conscience rapidement que notre faciès nous range dans la catégorie ‘portefeuille’. C’est une perpétuelle bataille pour préserver son argent : sollicitations incessantes et à des prix démesurés. Non seulement c’est usant à la longue, mais on se sent en plus non respecté, car ce qu’ils demandent est irraisonnable. Pour nous qui aimons une justice équitable, ça ne passe pas. Qu’on paie un peu plus qu’un local, normal ; qu’on paie beaucoup plus, arghhhh. Pour une mise en situation, voici un aperçu de nos déplacements dans Dehli.

JOUR 1
Arrivés à une gare de Dehli avec de gros sac-à-dos, on étudie le Lonely pour connaître les tarifs. Pas d’information exacte; proche de 70Rs. La règle générale qu’on s’est faite est de 10Rs/km en auto-rickshaw. Moitié moins en rickshaw (tuktuk) et deux fois plus en taxi. En campagne, 10Rs est bien payé ; en ville, c’est juste car les bouchons compliquent la circulation ; il convient d’ajuster à la marge. On a 6-7km devant nous, bref un 80-90Rs nous semble indiqué. Dès qu’on sort de la gare, tous les taxis, tuktuks et auto-rickshaws nous alpaguent. 300Rs pour la ballade ! Ils ne savent pas encore où on va, mais le prix est connu… Génial. On dit 100Rs ; ils nous rient au nez, tout au plus 250Rs. On avance 10m, un nouveau groupe nous tombe dessus. Pas mieux, ils rient entre eux en nous disant 250Rs. On persévère, un gars seul descend à 200Rs en taxi. On revoit le groupe d’auto-rikshaw qui continue de nous proposer 250Rs… Ah? Ok pour 200Rs pour eux. Finalement, y’en a un qui, isolé, descend à 150Rs. Une délivrance! Malgré tout trop cher à nos yeux… 100Rs est déjà un bon prix, alors 150Rs… Mais pas le choix.  On part chercher nos sacs; un chauffeur de taxi nous propose ses services pour 250Rs. Notre chauffeur de tuktuk arrive. On est trop fier de dire au taxi qu’on a trouvé pour moins ; discussions entre lui et le tuktuk. Non, ce n’et pas moins car avec les 150Rs, il faut ajouter 55Rs de parking de la gare. Lui, ça ne sera finalement que 200Rs tout compris. Notre chauffeur confirme avec un rictus. Ok… Nouvelle discussion de 10 minutes qui nous énerve au point que, même fatigués, on prend nos sacs pour aller chercher un tuktuk hors du parking de la gare. Les sacs sont très lourds et Elise se sent faible, mais le foutage de gueule est trop fort.  Du coup, notre tuktuk nous arrête pour nous dire « ok 150Rs »… On aura la confirmation par un indien le lendemain que ce trajet coûte 70-80Rs ; notre idée des prix est juste et on n’accepte pas l’injustice.
Arrivés à la guest house, super accueil ! On nous offre deux bouteilles d’eaux (offrir…c’est bien la première fois en Inde). Le manager, après s’être renseigné de notre programme, le trouve bien (quoiqu’il ferait plus de minivan au Rajasthan pour admirer le paysage) et il nous conseille d’aller réserver rapidement nos billets de train au centre d’information touristique car il y a des vacances/fêtes. En plus, il doit aller chercher qqn à l’aéroport, il peut demander à son chauffeur de nous déposer en chemin. Super ! On monte poser nos affaires et on redescend prendre la voiture. Le chauffeur nous dépose devant un centre d’information et nous attend. Pour Kevin, ça ne colle pas… Trop beau et placé ailleurs que là oú il est théoriquement situé. Pour Elise, pas de problème, on présente notre voyage et on voit ce qui peut être fait, au pire, on partira si ça ne nous convient pas. Après 20 minutes d’attente, on présente notre programme. Le ‘conseillé’ le trouve compliqué et modifie un peu l’itinéraire en fonction de nos impératifs. Ça semble bien sauf qu’il prévoit des trajets minivan de jour là où on prévoit des trains de nuit pour économiser du temps. On lui explique que son timing ne passe pas et il nous explique qu’il n’y a pas de train au Rajasthan. Si puisqu’on en a repéré deux… Si c’est le cas, montrez-moi vos billets… On vient justement pour réserver…  « Mais il n’y a pas de train, madame! ». La phrase de trop. On sort de l’agence, notre chauffeur nous reprend. Il fait semblant de s’étonner que le centre veuille nous vendre des services… Si on veut aller au centre d’infos officiel, il lui faut l’adresse précise – puisque chauffeur à Dehli, il ne la connait pas évidemment… Pas de bol, le Lonely insiste sur ce point et on la lui donne. Il doit avoir du mal à la retenir car il nous dépose de nouveau devant une agence de voyage en nous disant « c’est là pour vous ». Nous ne nous éternisons pas et allons à pieds dans notre centre d’infos, le chauffeur ne nous ayant pas attendu cette fois-ci… Nous apprenons l’existence d’un métro; on pourra se déplacer pour l’essentiel par métro pour un coût raisonnable.

JOUR 2
On va visiter les gros sites immanquables de la ville : le Red Fort et le tombeau d’Humayun, et on ajoute le temple du lotus et leurs Champs-Elysées. Pour le Red Fort, on y va sans problème en métro. Comme à Pékin ou toute grande métropole, les distances restent longues entre la station et l’endroit visité, mais c’est ok. Pour le tombeau, il faudra marcher 1,5km environ à partir de la sortie de métro. Il y a bien un tuktuk, mais il propose 40Rs en dernier prix… Face aux 10Rs qu’on est prêt à payer…et encore… on y va donc à pieds (15 à 20 minutes – mais on parcourra 2km de plus en faisant un mauvais choix à un croisement, donc un peu plus long – l’entrée était juste à 2 pas sur notre gauche et on a fait tout le tour du site par la droite !). Visite à pieds. En sortant du site, toujours des tukuks ou auto-rickshaws qui nous proposent leur service. On pense se faire refouler mais on évoque quand même nos 10Rs : ok…?!?… On a mal entendu ? Non, un auto-rickshaw arbore un sourire en signe de bonne affaire. On monte et il nous demande où on veut aller en métro. On lui dit, il nous propose d’y aller (2,5km plus loin) pour 30Rs seulement! Pour une fois qu’on a un prix raisonnable, on n’en a pas besoin… Mais lui n’en démord pas. Ok, on quitte l’auto-rickshaw pour aller à pieds à notre station de métro. 20 mètres plus loin, un tuktuk nous propose de nous conduire. Pour nous, 10Rs pour l’auto, donc 5Rs pour lui. Et son prix est de 3Rs! On lui demande de répéter. ‘Three rupies, three’ tout en nous montrant trois avec ses doigts… pour une fois qu’on nous propose un vrai prix et qu’ils préfèrent gagner un peu mais surement, plutôt que d’attendre le gros poisson. On est content et on se dédit de nos mauvaises pensées. Il nous dépose non loin d’une bouche de métro qu’on ne voit pas. Bon… Kevin lui donne les pièces pour 3Rs et le chauffeur le regarde avec des yeux ronds. ‘Money mister, money’. Ah… On lui dit qu’il l’a ; il commence à crier et à alerter son copain qui attend ; un auto-rickshaw s’arrête pour comprendre à son tour ; lui crie en Hindi on ne sait quoi auprès de ses collègues, on répond en anglais qu’on a payé comme convenu… On comprend qu’il attendait 30Rs, mais il continue d’aboyer ‘three, three’ en montrant 3 du signe de la main… Ses collègues comprennent son erreur mais nous disent de lui donner 30Rs…non? au moins 10Rs alors. Pour nous, pas question car sinon on n’aurait pas eu recours à ses services (même pas 2minutes de vélo…). Il agrippe Kevin au bras tout en criant ; Kevin crie de le lâcher, etc. Finalement, on s’en va pendant qu’il plaide sa cause auprès de ses camarades, en bonne conscience mais déçu des événements (et qu’on puisse penser qu’on peut payer 30Rs pour 1km – sans blague). On a quand même eu un peu peur qu’il ne lâche pas et devienne violent!

JOUR 3
On prend un petit déj’ salvateur au Dunkin Donuts. Situé près de la place centrale, on est systématiquement abordé par un indien qui nous propose son aide pour nous diriger en fait vers une agence de voyage. Mais là, le prix du restaurant pour les locaux le transforme en havre de paix. Un indien aimable entame une conversation, qui après 5 minutes, n’a d’autre objectif que de nous vendre son agence de voyage. Rhaaa! Décidément, pas d’amabilité mais que de l’intérêt pécunier dès qu’on s’adresse à nous. On en vient à regretter notre France… Et à avoir le blues en fait.
Bon, on part pour Qutub Minar en métro. La station est de nouveau éloignée du site. Mais on est réfractaire au tuktuk, donc on y va à pieds. On est mal orienté par un indien et on marche un peu plus que prévu, mais on atteint notre destination sans problème :-). Le retour se fait à l’aise du coup.
Il est finalement le temps de partir pour prendre notre train, direction notre gare préférée à l’autre bout de la ville. C’est bête car on a dormi à deux pas de la gare principale mais les trains en direction d’Amritsar étaient tous pleins. Plutôt que de prendre l’auto-rickshaw (150Rs l’aller – 6km), on va se rapprocher en métro pour payer moins à la sortie (2km). Pas la meilleure idée car se balader avec de gros sacs dans un métro archi bondé, c’est pas top. Pour enfoncer le clou, Kevin s’est fait volé son porte-monnaie. Il a senti la main mais n’a pas pu la stopper. On est littéralement expulsé du wagon quand on a un gros sac, sans possibilité de se retourner, et une main de prise par un 3e sac ; qqn a profité de l’occasion et n’a pas flanché quand Kevin a crié ‘Money! Money!’… On accuse le coup. Pas dramatique, mais un nouveau désagrément malgré tout. On poursuit et on arrive à notre sortie. La station de train se situe à 2-3km. Et le juste prix des tuktuks à la sortie ? 100Rs ! Rien que ça. On explique qu’on n’a que 30Rs en monnaie, on fait descendre difficilement à 60Rs. On s’en va et un jeune conducteur de tuktuk nous suit sur 30 mètres en nous narguant ‘6km, 6km…’.
On a dû marcher vite en étant très chargés car on n’avait pas beaucoup de marge dans le timing. On arrive épuisés à la gare, sous pression pour trouver notre train qui part dans 20 minutes. On voit un tableau d’affichage en Hindi qui indique un train à 19:05 sur le quai 7. On traverse la gare pour atteindre notre train. Son numéro est le 12993 alors que le nôtre est le 12903 ; une erreur d’impression, ils sont brouillons ces indiens. Par contre, il va à Udaipur, et ce n’est pas du tout le chemin… On retraverse la gare; 10 minutes restantes. On se renseigne : quai 1. On trace pour repérer notre wagon et s’installer.
On quitte non sans peine cette ville de Delhi, un peu abattus.

On ne sait pas quelle est la morale de cette histoire. Les montants en jeux sont risibles (1€=70Rs environ ou 100Rs=1,5€)… Mais on est des personnes de principes qui cherchons une équité. Au final, tous les efforts supplémentaires qu’on a fournis pour économiser ont été anéantis par ce vol de portefeuille. On aurait pu bénéficier de plus de confort avec la somme perdue. C’est décidé, on fera plus de tuktuks avec nos gros sacs.
Bref, on a eu le blues.